L’Oiseau bleu : une féérie philosophique et citoyenne
Dans ce « spectacle total » où théâtralité se conjugue avec féérie, deux jeunes artistes atteints de handicap mental incarnent les personnages principaux du conte philosophique de Maeterlinck, entourés d’une équipe artistique solidaire et soutenus par une éducatrice spécialisée. Ce projet, à la fois exigeant sur le plan artistique et militant sur le plan citoyen, ouvre grand les portes d’un théâtre aux allures de fête à tous ceux, petits et grands, qui veulent bien se risquer à la rencontre et au rêve.
Un conte philosophique sur la quête du bonheur
Alors que Tyltyl et Mytyl, deux enfants de bûcheron, observent avec convoitise les petits riches célébrer Noël, la fée Bérylune les envoie chercher l’oiseau bleu afin qu’ils découvrent que la félicité se trouvait devant leur yeux. Dans cette pièce fleuve aux 150 personnages et aux 11 tableaux, Maurice Maeterlinck, dramaturge belge et maître du symbolisme, questionne notre rapport au bonheur à travers une épopée mystique et enchanteresse qui nous invite à renouer avec notre part d’enfance. Ici, les animaux sont pourvus d’une âme, tout comme les végétaux et les objets les plus fantaisistes qui peuplent le monde fascinant du poète. Avec, au cœur de l’étrange et du mystérieux, un message d’espoir et de tolérance à la portée universelle.
Quand le handicap fait la différence
C’est à la suite d’une rencontre avec des jeunes atteints de handicap mental à l’Externat Médico-professionnel de Fontenay-sous-Bois qu’est né le projet de L’Oiseau Bleu. L’atelier au cours duquel l’œuvre de Maeterlinck servit de support à l’imaginaire et au travail d’acteur, avant de faire l’objet d’une représentation de fin d’année, est à l’origine du désir de créer un spectacle professionnel mixte réunissant acteurs valides et artistes atteints de handicap. Entre temps, le projet a suivi un chemin de maturation, tout en restant animé du même désir de provoquer la rencontre. Une importante équipe de professionnels, sensibles à la démarche de mixité, s’est mobilisée dans le processus de création : aux dix interprètes présents sur le plateau se sont joints chorégraphe, compositeurs, scénographe, vidéaste, costumière, maquilleuse… et éducatrice spécialisée.
La fabrique d’un spectacle total
Avec L’Oiseau bleu, Maeterlinck s’inscrit dans un vaste mouvement de recherche autour du « spectacle total », sorte d’objet scénique idéal où les différents arts en présences (arts plastiques, danse, théâtre, musique…) doivent se répondre harmonieusement pour créer un langage proprement spectaculaire. La mise en scène de Guillaume Caubel reprend à son compte cette quête qui se concrétisa au début du XXe siècle avec les fameux ballets russes et suédois, tout en cherchant à revenir à une certaine fabrique du spectacle qui assume la théâtralité sans pour autant sacrifier l’illusion à la mise à abime. Chacun des éléments mis en jeu (décors, costumes, lumières, accessoires de cirque, projections vidéo…) prend un sens nouveau en interagissant avec les autres, l’ensemble formant une expérience sensorielle étonnante, entre opéra rock et conte de Noël.